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Origines Des Difficultés D’une Gouvernance Difficile à Mettre En Place

Origines des difficultés d’une gouvernance difficile à mettre en place

Le marché du droit français démontre que peu de cabinets survivent à leurs fondateurs et beaucoup disparaissent pour n’avoir su anticiper la transmission.

L’appréhension des difficultés à mettre en place une gouvernance au sein d’un cabinet d’avocats, nous permet, sans conteste, d’en apprécier les solutions.

Un contexte induisant le manque de recul

Les principes intangibles de liberté de choix du client et de liberté d’installation de l’avocat peuvent naturellement fragiliser la pérennité des clientèles et des structures.
A la différence des produits, on ne possède pas les services, on y accède temporairement : les services sont des performances intangibles ce qui induit des difficultés à modéliser et reproduire les schémas.
Enfin, les règles professionnelles ont longtemps été défavorables à l’exercice en commun de la profession :

• La profession d’avocats est, on le sait, « libérale et indépendante »
• Les règlements intérieurs précisent même qu’il en va ainsi : « quel que soit le mode d’exercice » retenu.

Mais, ces règles évoluent…

La spécificité de l’entreprise d’avocats
Une première spécificité du cabinet d’avocats est sa structure capitalistique particulière. Elle diffère, en effet, de l’entreprise commerciale classique souvent caractérisée par une dissociation entre l’actionnariat et la gestion effective de la société. Dans l’entreprise d’avocats, il y a généralement confusion entre les deux organes que sont l’Assemblée générale des actionnaires associés et le conseil d’administration.
Dans de nombreuses associations d’avocats, tous les associés sont à la fois actionnaires et administrateurs. Il est même fréquent que la gestion journalière se confonde partiellement avec l’assemblée générale et le conseil d’administration.

Il s’en suit que la gestion des relations entre associés, conditionne de manière incontestable la réussite ou l’éclatement d’un cabinet.

La moindre hiérarchisation, voire l’absence de hiérarchisation dans les cabinets, constitue un élément distinctif par rapport à l’entreprise traditionnelle. Le consensus devient souvent un outil de management du cabinet d’avocats.

Les associés : un rôle de producteur et de vendeur

Au-delà de la gestion, il est rare dans l’entreprise classique, de trouver des PDG, DG, DGA ou autres directeurs directement impliqués dans la production des services de l’entreprise. Ils sont, en général, tout à leur mission de développement de la question administrative ou commerciale qu’ils gèrent pour le compte des services productifs de l’entreprise.

Partant, dans les cabinets d’avocats, l’art de la délégation de son temps de production pour développer son temps commercial ou, managérial, devient un enjeu majeur. La responsabilité du ou des associés qui doivent impulser cette réflexion est fondamentale. Ils deviendront également un modèle à suivre.

Il s’en suit que le mode de rémunération est déterminant pour bien diriger, selon le fameux adage « ne se réalise que ce qui est reconnu », mais également afin que l’harmonie des principes de direction soit. C’est d’une gouvernance claire, traitant des questions de mode de répartition du résultat, des principes d’association et de sortie, de la vie en commun et du règlement des conflits qu’il s’agit.

Enfin, un syndrome complémentaire, issu d’une production étroitement mêlée à une direction et une commercialisation demeure, celui de la question de la propriété de la clientèle développée.

Patrimonialité et mesures de protection du patrimoine, particularités des cabinets

Dans l’entreprise, un dirigeant dès lors qu’il est associé au capital, recherche une création de valeur par la productivité, la compétitivité et le résultat.

Le modèle économique mis en œuvre devient donc plus pertinent et résiste de façon plus efficace à la concurrence.

Or, l’élément essentiel du patrimoine d’un cabinet d’avocats, demeure encore la clientèle, dont la protection constitue évidemment un élément de gouvernance.

Les difficultés de protection du patrimoine lors du départ d’un collaborateur et à fortiori d’un associé, dont il est inutile de rappeler les dégâts qu’il peut créer, résultent des principes intangibles que sont la liberté de choix du client et de la liberté d’installation de l’avocat. Cependant, depuis 2000, l’existence du fond libéral est reconnue, ce qui relance donc la question de la patrimonialité avec acuité.

Alors, comment concilier les principes de liberté et ceux de fond libéral ?

Il nous semble que l’organisation d’une gouvernance claire à cet égard permet d’envisager les principes suivants :

  • Une gestion de la clientèle orientée vers le cabinet et non vers l’avocat.
  • Des relations entre avocats orientées vers le développement et la protection du patrimoine du cabinet :
    • Mesures en faveur de la fidélisation des collaborateurs qui développent une clientèle pour le cabinet,
    • Aide à l’installation pour les avocats qui quittent le cabinet sans clientèle (financière, matérielle, organisationnelle, sur le long terme,
    • Définition, a priori, des règles de mise en commun, de gestion et de cession de la clientèle, pour les associés,
    • Capacité du cabinet à attacher la clientèle à la structure et non pas à la personne physique qui la gère,
    • Développement d’un marketing ciblé sur les valeurs incorporelles du cabinet, par opposition à l’avocat.
    • Marque (cabinet, département, internationale)
    • Logo / nom de domaine et site Web
    • Fichiers clients et prospects.

En d’autres termes, patrimonialité et gouvernance sont intrinsèquement liées dans l’exercice de création de la ronde de valeurs incorporelles ou des survaleurs nécessaires à l’exercice de la pérennité.

L’appréhension de l’investissement et de la gestion du temps : un rapport difficile

L’activité quotidienne d’un cabinet vit au rythme des heures dites facturables d’un coté et non facturables de l’autre. Sans doute du fait de l’axiome bien connu du « Tout ce qui est facturable est important, le reste est secondaire ».
Cette dichotomie qu’impose le métier de la prestation intellectuelle oblige à une dictature du court terme pouvant mettre à mal la pérennité même du cabinet.
Rappelons selon la formule de David Maister, Professeur à la Havard Business School et gourou américain des services professionnels que « Ce que vous faites de vos heures facturables détermine vos revenus actuels mais ce que vous faites de vos heures non facturables détermine votre futur ».
Ainsi, cesser d’opposer facturable à non facturable et inscrire la totalité de son temps dans un équilibre entre la priorité des clients et la pérennité et l’avenir du cabinet, constituent des axiomes incontournable de la gouvernance.

• L’acceptation maîtrisée des non valeurs : la prise de risque ou investir

Adaptée au cas particulier du cabinet d’avocats, une non valeur est ce qui n’est pas immédiatement facturable. Il s’agira donc d’investissement.

Soyons clairs tout effort d’investissement est à quantifier. Or, le premier de ces efforts est en général le temps passé. Viennent ensuite les engagements financiers.

Il conviendra donc de mesurer et de quantifier avec précision le temps investi dans les actions de développement et, partant, de choisir celles pour lesquelles le retour sur investissement est le plus élevé.

Le problème fréquemment rencontré dans les cabinets réside dans le fait que les objectifs sont fixés en termes de facturation et peu, voire jamais, en termes d’investissement. La conséquence induite est un raisonnement d’urgence et peu prospectif.

La spécificité financière : une notion souvent peu appréhendée

Un préalable à une activité économique est la mobilisation des ressources financières. L’entreprise doit « libérer » du capital.

Dans l’entreprise d’avocats, évoluant sous le statut de profession réglementée, l’apport de capitaux par l’intermédiaire du marché financier est impossible.

Par conséquent, le financement de l’activité, en particulier, dans les structures en BNC, ne peut se faire que par un dépôt en compte courant des associés, un contrôle draconien des coûts des investissements et du retour sur investissement et par conséquent des temps et de la productivité.
Notons enfin qu’eu égard aux questions de trésorerie, le mécanisme des professions libérales n’est pas toujours intelligible.
Par méconnaissance des règles financières, des rouages comptables et de gestion, par l’application des comptabilités de caisse, la profession est souvent en proie à des difficultés de trésorerie majeures…

L’absence de réflexion sur ces problèmes financiers, que nous rencontrons trop fréquemment, viennent obérer les capacités à la pérennité.

Caroline Neveux

Consultante

Finance et Stratégie
Médiation

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